Il était une fois dans l’Est
Dates à retenir
Création sur mesure en Cœur de Pays Haut
Collectes de récits d’habitant·es autour de la thématique de l’adolescence
« Il était une fois dans l’Est » est un projet de territoire mené depuis 2 ans sur le Cœur de Pays Haut (54) à l’initiative de Scènes et Territoires, avec le soutien du conseil départemental de Meurthe et Moselle.
Dans ce territoire singulier constitué de 25 communes et 23000 habitants, le paysage et les mémoires sont fortement marqués par les mines de fer et la sidérurgie. Mais l’essentiel est invisible pour les yeux (comme les 40000 km de galeries creusées sous terre).
Les artistes de la Cie ont conçu un programme de travail sous de multiples formes, avec diffusion de spectacles, résidences, ateliers, rencontres, collectes de documents et de récits, pour faire émerger ces réalités enfouies. Avec un angle universel et commun à toustes au gré des époques et des territoires : l’adolescence.
Cette belle aventure, riche et singulière, est adaptable à d’autres régions, d’autres histoires, d’autres destins, d’autres habitant-es !
Vous trouverez ci dessous des paroles de chaque personne impliquée.
Il s’agit de version raccourcies. Nous vous invitons à télécharger la version « journal » complète de ces portraits croisés en pdf dans la section « Ressources » ici à gauche.
Vous pouvez découvrir les 30 témoignages illustrés sur le site Devenir(S) consacré à la collecte et au partage de récits adolescents.
En images :
Raconter un territoire par le biais des adolescences
Benoit Faivre : Codirecteur artistique de la Cie La Bande Passante.
Responsable du cycle consacré à l’adolescence Devenir(S) ainsi que des projets de territoires associés.
« Le travail sur l’adolescence s’inscrit dans la recherche artistique de la compagnie. Il y a toujours cette question de savoir comment on se construit en tant qu’individu. Il y a quelques années déjà, nous avons ouvert un nouveau cycle documentaire autour des récits adolescents intitulé Devenir(S) lors duquel nous avons récolté de nombreux récits adolescents. Nous avons imaginé un site internet pour les réunir les paroles adolescentes et les mettre en lien, dans l’espace et le temps. »
« Il était une fois dans l’Est a donné un nouvel espace de déploiement à ce projet. Lors de cette résidence nous avons travaillé avec les ados pour qu’iels récoltent les paroles d’anciens ados d’autres générations. Les récits ont donc rejoint les récits d’autres travaux de collectes. Le projet Il était une fois dans l’Est, construit sur mesure pour raconter un territoire, s’inscrit donc dans un tout plus grand qu’il contribue à éclairer. »
Une résidence artistique avec les adolescent·es du collège Joliot-Curie de Tucquegnieux
Camille Pereira est directrice culturelle de Scènes et Territoires, à l’origine de l’invitation de la compagnie La Bande Passante sur le Cœur de Pays Haut
« Scènes et Territoire accompagne les collectivités locales dans l’analyse des besoins et la définition des enjeux culturels propres à leur territoire. Le diagnostic que nous avons fait avec la Communauté de Communes Cœur de Pays Haut a révélé l’envie d’un projet qui interroge la façon dont les cités minières ont façonné les paysages et les mémoires. On a tout naturellement pensé à la Bande Passante, au spectacle Au Fond et avec Devenir(S) dans la dynamique de collecte de récits intimes d’ados. »
« En lien avec les collectivités, nous avons travaillé avec différents publics. Nous avons d’abord commencé par une résidence au collège Joliot Curie de Tucquegnieux, nous sommes allé·es ensuite chercher de nouveaux partenaires en fonction de ce que la compagnie construisait : associations locales consacrées à la Lecture Publique, à l’Histoire locale et à la Musique (Trieux 63, La Chaise Musicale). »
Ici à l’époque, c’était l’Amérique
Tommy Laszlo : coresponsable artistique de la Cie La Bande Passante. Il a participé aux ateliers et aux collectes et à donné à cette résidence sa dimension BD/Western.
« Dans le Cœur de Pays Haut, il y a ces grands territoires qu’on traverse en voiture. Quand je cherchais un titre, m’est venu l’iconographie western qui a bercé mon adolescence et l’image de la diligence pour aller d’un lieu à un autre.
Et les gens que nous avons rencontrés dans le Cœur de Pays Haut nous disaient « Ici, à l’époque, c’était l’Amérique », ils faisaient le lien avec la conquête de l’Ouest, le territoire minier devenait la conquête de l’Est. »
« La façon dont j’ai perçu le Cœur de Pays Haut a résonné avec mes propres recherches sur la Bande Dessinée. C’est cette manière de s’évader par le dessin : tu habites dans le Grand Est et par un coup de crayon, tu peux te retrouver dans le Grand Ouest américain.«
« Nous avons exploré ce territoire aux travers de rencontres, d’ateliers avec les collégien-nes, de dessins et d’esquisses, de compositions musicales dans les lieux emblématiques. Le 15 juin a été l’occasion de mettre toutes ces recherches artistiques en commun, lors d’une journée d’inauguration festive dans l’église en fer de Crusnes. Avec une exposition interactive en accès libre l’après midi, et un spectacle en soirée réunissant tous les artistes et les ados qui ont participé à ce travail. »
Un projet inclusif et intergénérationnel pour apprendre de nos différences
Olivier Tellier : Maire de Trieux, Vice-Président Culture, animation, tourisme à la communauté de communes du Coeur de Pays Haut
« J’ai appris à connaître les personnes de ce territoire, à découvrir leur Histoire, qui est en train de disparaître en même temps que les anciens. Je me suis dis qu’il fallait garder une trace de ces témoignages et qu’il était important de transmettre cette Histoire face à la fermeture d’esprit de certains aujourd’hui.
« Ce qui est important pour moi c’est ce travail d’intergénérationnel et d’inclusion. Que les gens du territoire apprennent à se connaître par leurs différences. »
« Moi je peux avoir des idées mais l’artiste a une vision et il sait mettre en œuvre, valoriser une réalité. Aujourd’hui nous avons 30 plaques illustrées réparties sur le territoire qui permettent d’accéder à 30 récits grâce à des QR-codes. Maintenant j’aimerais que nous fassions des parcours thématiques sur des lieux en particulier, comme par exemple sur Trieux autour des grèves de 1963 ou sur Tucquegnieux sur le quartier de “La petite Pologne” pour parler de la mixité des populations. J’aimerais aller plus loin oui. Dans dix ans, avoir 200 récits accessibles sur nos communes ! »
Des récits vivants, simples et passionnants
Laurence Moletta : créatrice sonore et musicienne multimédia, elle a animé les ateliers avec les les élèves du collège Joliot-Curie de Tucquegnieux avec qui elle a collecté les récits des habitant-es et réalisé le montage de 30 capsules sonores.
« Je suis compositrice, chanteuse, instrumentiste. Depuis 2020, je crée des parcours sonores géolocalisés, qui utilisent des applications numériques qui permettent aux gens d’écouter des histoires tout en se promenant. »
« La spécificité dans ce projet de territoire c’est que je n’étais plus seule à bord. J’ai embarqué une classe d’ados avec moi, dans l’optique de leur faire comprendre tout le processus du déroulement de l’interview jusqu’à une restitution finale de type podcast.«
« Grâce à l’entrée par les récits d’adolescence, j’ai écouté avec passion ce que les gens avaient à raconter. Des anciens ados qui parlent à des ados d’aujourd’hui, ça rend les récits vivants et simples. Ce qui m’a vraiment touchée dans ce milieu des mineurs, c’est la solidarité qui revient dans presque tous les récits. Ils parlent de l’entraide, des jeux ensemble, du mélange entre nationalités, sans racisme. Tout le monde était dans le même bateau et quand ils en parlent, tu sens qu’ils sont transportés, dans leurs regards ça pétille. »
Touchés par des récits, des souvenirs partagés
Inès, Loucia et Pierre sont des collégien·nes de 3eme qui ont participé à la collecte de récits sur le territoire, notamment auprès de leurs proches.
« Inès : ce qui m’a le plus marquée c’est d’être dans du pratique. J’ai
aussi découvert qu’il y avait des mines ici, et la guerre.’
« Loucia : moi ce que j’ai aimé c’est de faire des dessins et des cartes mentales à partir des enregistrements. »
« Pierre : ce que j’ai préféré c’est quand j’ai interviewé Claudine Matassoni, que je ne connaissais pas et que j’ai découvert son histoire, ça m’a touché. »
« Tous : Avant Il était une fois dans l’Est, nous ne connaissions rien du Coeur de Pays Haut. Nous avons découvert un peu de son histoire et de la réalité de ses habitants. »
« Loucia: Papa parle plutôt portugais c’est donc maman, Nadine, qui a accepté de jouer le jeu. C’était un moment de partage, il y a eu beaucoup de fous rires, de souvenirs partagés. »
« Inès: j’ai interviewé mon voisin. Aujourd’hui il est psychologue et ce qui m’a touchée c’est qu’il ne vivait pas bien son adolescence, il était triste et mal dans sa peau. Je n’aurais pas imaginé ça. Ça m’a touchée le récit de Frédéric. »
« Pierre: J’ai interviewé mon père. J’aimerais lui dire Merci pour ces instants passés avec toi et les conseils que tu m’as donné, papa »
Raconter pour ne pas oublier
Emilie Henquinet est fille, petite fille et arrière petite de mineurs. Elle a été interviewée par les élèves en tant que personne témoin.
« J’étais très honorée d’être invitée au collège Joliot-Curie pour être interviewée par les élèves. J’ai emmené mon acolyte Stéphan Rog, qui a fait 30 ans de mine. Moi, mon père était mineur, mon grand-père était mineur, mon arrière grand-père était mineur. »
« Je dis souvent que les hommes de ma famille ont laissé tellement de sueur dans ce sous-sol lorrain que j’ai un lien très fort avec cette terre. Je veux transmettre ce patrimoine aux générations futures.
Cette rencontre, c’était génial. »
Redécouvrir son environnement, sa famille, son histoire
Marie Fiefel est enseignante référente de “Il était une fois dans l’Est” au collège Joliot-Curie de Tucquegnieux.
« Je crois que l’art, et la culture au sens large, sont une clé, tant pour la compréhension du monde qui nous entoure que pour l’épanouissement de soi-même. »
« Les élèves étaient curieux de redécouvrir leur environnement (et leur famille pour certains) qu’ils croyaient connaître. Cela les a impliqués dans une démarche collective, et les a davantage placés dans une situation de communication. Découvrir l’aspect technique (son et lumière) les a aussi beaucoup intéressés, car ils ont besoin de concret dans une scolarité où les enseignements sont très généraux. »
« Plus le temps passe, plus j’ai l’impression qu’il y a des choses à découvrir et que c’est un territoire en reconstruction. Et chacun peut prendre part, à son niveau. C’est assez plaisant d’habiter un territoire où l’on a l’impression d’avoir quelque chose à faire. »
En images :
Le dessin pour tisser du lien et attiser la curiosité
Étienne Gendrin est originaire d’Alsace. Il est dessinateur et auteur de Bandes Dessinées documentaires. Il a illustré chacun des 30 récits sonores pour les plaques implantées sur le territoire et le site « Devenir(S) ».
« la BD que je pratique part toujours de rencontres. J’utilise la BD pour pour raconter des morceaux de réel qui m’ont ébloui ou touché.
J’ai plutôt un caractère doux et pas mal à me planquer, à être le scribouillard dans sa chambre sous les toits. La BD c’est un peu comme m’offrir une autre vie. J’aime être derrière l’épaule du personnage et vivre l’aventure avec lui, être dans sa psyché, dans son coeur. »
« Dans le projet “Il était une fois dans l’Est”, la résonance forte pour moi, c’est le côté histoire du quotidien. Les témoignages récoltés dans le Cœur de Pays Haut sont des petites histoires qui nous font accéder à l’Histoire du territoire, à une dynamique qui n’existe plus aujourd’hui. »
« Les illustrations pour le projet accompagnent des panneaux avec des QR codes. Ils préexistent à l’audio que vont découvrir les visiteurs avec leur téléphone. Donc il fallait trouver un juste équilibre entre donner envie et garder un effet de surprise, ne pas tout dévoiler. Je voulais que le dessin crée une curiosité dont la clé est dans l’audio. Les deux fonctionnent ensemble : l’un augmente l’autre et vice-versa. »
La musique au cœur de la rencontre
Thomas Guiral est multi-instrumentiste. Il a composé les habillages musicaux des capsules sonores.
« J’ai rencontré Tommy lors d’une formation à Tucson en Arizona. J’y allais pour apprendre des musiciens et techniciens de là-bas. Le travail de la compagnie a résonné avec mon propre travail autour de l’archive. Je collectionne les instruments de musique. J’aime m’en servir en sachant qu’ils ont déjà eu une histoire et qu’elle m’influence même si je ne la connais pas. »
« J’ai reçu une éducation musicale classique. Mes parents étaient musiciens professionnels. Adolescent, j’ai découvert la musique américaine. J’étais heureux d’avoir mon propre univers musical. C’est plus tard que j’ai compris que la musique américaine s’est construite depuis 300 ans en lien avec l’histoire de l’immigration : c’est un conglomérat de musiques de différents pays, de différentes cultures.«
« Dans la musique, il y a une notion vibratoire qui touche l’universel et crée une autoroute pour se rencontrer. Avec des personnes, c’est un souvenir qui va remonter et rassembler par l’émotion. Nous avons joué dans le salon d’un ancien porion et de sa femme. Elle nous a raconté le jour où elle avait vu Edith Piaf à la salle de spectacle construite par la mine. Nous lui avons joué « la foule ». Nous étions des inconnus et d’un coup le regard a changé sur la rencontre.
Nous sommes aussi allés sur des lieux marqués par des vécus. Très modestement, avec juste une guitare, j’ai essayé à travers mon intime et mon interprétation, de transmettre ces endroits, leurs énergies et leur Histoire qui est belle et qui est oubliée.
Par la musique, je cherche à devenir passeur de quelque chose. Je crée une rencontre entre des humanités. »
« Lors de l’inauguration, pour la première partie de la soirée, l’idée était d’accompagner la parole des ados, les récits d’habitant-es et les dessins d’Etienne avec une musique qui est à cheval entre la musique de composition pure et l’hommage à cette esthétique américaine. Amener des étendues sauvages qui donne d’un coup une autre dimension au Cœur du Pays Haut.
Pour la deuxième partie, plus festive, j’ai rejoint Tilmann et Evan, du groupe Awesome Possums. Nous avons joué de la musique américaine appelée « Old time ». C’est une musique populaire anglophone typique, qui est née des rencontres spontanées entre musiciens immigrés de différents pays, chacun avec leur instrument. »
ÉQUIPE DE CRÉATION
Direction Artistique et Pilotage : Benoit Faivre, Tommy Laszlo
Interventions Collège Joliot-Curie : Laurence Moletta, Tommy Laszlo
Collectes de Témoignages : les élèves de 3ème, Laurence Moletta, Tommy Laszlo, Benoit Faivre
Montage et Mixage : Laurence Moletta
Illustrations : Etienne Gendrin
Musique : Thomas Guiral
Création des supports web : Benoit Faivre
PARTENAIRES
Il était une fois dans l’Est est un projet coréalisé avec Scènes et Territoires
Avec le soutien de : la DRAC Grand-Est, la Région Grand-Est, le conseil départemental de Meurthe et Moselle (résidences au collège, appui aux Territoires 54), la Communauté de communes Cœur du Pays Haut
Avec la participation de : le collège Joliot-Curie de Tucquegnieux, la Maison des Mille Marches (FabLab de Briey), La Chaise Musicale